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n’était rendu au chef suprême de l’armée. Les gardes nationaux, appuyés sur leurs armes, ne saluaient pas ; ils regardaient passer le cortége dans l’attitude de la force, de l’indifférence et du dédain.


XXVIII

Les voitures entrèrent dans le jardin des Tuileries par le Pont-Tournant. La Fayette, à cheval à la tête de son état-major, était allé au-devant du cortége et le précédait. Pendant son absence, une foule immense avait inondé le jardin, les terrasses, et obstrué la porte du château. L’escorte fendait avec peine ces flots tumultueux. On forçait tout le monde à garder son chapeau. M. de Guillermy, membre de l’Assemblée, resta seul découvert, malgré les menaces et les insultes que cette marque de respect attirait sur lui. Voyant qu’on allait employer la force pour le contraindre à imiter l’insulte universelle, il lança son chapeau dans la foule assez loin pour qu’on ne pût le lui rapporter. Ce fut là que la reine, apercevant M. de La Fayette, et craignant pour les jours des fidèles gardes du corps, ramenés sur le siége de la voiture et menacés par les gestes du peuple, lui cria : « Monsieur de La Fayette, sauvez les gardes du corps. »

La famille royale descendit de voiture au bas de la terrasse. La Fayette la reçut des mains de Barnave et de Pétion. On emporta les enfants sur les bras des gardes natio-