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tions de surprise, de joie et de colère, que la fuite et l’arrestation du roi y ont excitées.


XXIII

La nuit s’était écoulée à Varennes, pour le roi et pour le peuple, dans les palpitations de l’espérance et de la terreur. Pendant que les enfants dormaient, accablés de la fatigue d’une longue route, d’une journée brûlante, et insouciants de leur sort, le roi et la reine, gardés à vue par les municipaux de Varennes, s’entretenaient à voix basse de leur affreuse situation. Leur pieuse sœur, Madame Élisabeth, priait à côté d’eux. Son royaume, à elle, était au ciel. Elle n’était restée à la cour, où elle était étrangère par sa piété et par son renoncement à tous les plaisirs, que pour se dévouer à son frère. Elle n’y prenait sa part que des larmes et des tribulations du trône.

Les captifs étaient loin de désespérer encore. Ils ne doutaient pas que M. de Bouillé, averti sans doute par quelques-uns des officiers qu’il avait postés sur la route du roi, n’eût marché toute la nuit à leur secours. Ils attribuaient son retard à la nécessité de réunir des forces suffisantes pour dissiper les nombreuses gardes nationales appelées à Varennes par le bruit du tocsin ; mais à chaque instant ils s’attendaient à le voir paraître, et le moindre mouvement du peuple, le moindre cliquetis d’armes dans la rue de Varennes, leur semblaient l’annonce de son arrivée. Le cour-