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Son fils Abdul Mejid a trouvé, à la mort de son père, l’empire libre, les préjugés domptés, des instruments tout formés autour de lui pour continuer l’œuvre civilisatrice de son père. Sa tolérance, servie par des ministres habiles, libéraux, élevés en Europe, accomplit l’œuvre de fusion des races, qui doit seule régénérer l’Orient.

Les cabinets de Londres et de Paris ont conçu pour ce jeune prince l’intérêt qu’on a pour la jeunesse d’un homme et d’un peuple à la fois. L’Europe a compris de plus en plus, par les événements de Hongrie, de Valachie, de Moldavie, que l’empire ottoman, civilisé, éclairé, armé, protégé, devenait un poids nécessaire à l’équilibre du monde, et que le Bosphore et les Dardanelles seraient avant peu les Thermopyles de la liberté des mers, et peut-être les Thermopyles de la liberté du continent contre de nouveaux débordements de Xerxès. La république française s’est retrouvée à l’instant alliée, sans traité, avec la Turquie : les deux peuples l’ont compris sans qu’il fût besoin de discours ou de négociations pour le leur faire comprendre. L’instinct est le plus sûr des diplomates. Le lendemain de la révolution de Février, la république envoyait, dans la personne du général Aupick, un ambassadeur conciliant et modéré, ami de la paix, mais capable d’inspirations énergiques au besoin, et de rappeler, aux violateurs de l’indépendance ottomane, que la France avait encore des Sébastiani dans ses négociateurs et dans ses généraux.

Abdul Mejid a montré, dans ces dernières circonstances, que sa douceur dans le gouvernement de ses provinces ne serait jamais un lâche abandon de sa dignité devant les exi-