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Hadifah, car ce n’est qu’un homme obstiné et injuste dans ses actions ! Ô Cais, si vous persistez dans le maintien de la gageure, de grands malheurs s’ensuivront ! Vous et lui vous êtes vifs et emportés tous deux, ce qui me donne de l’inquiétude sur vous, Cais. Mettez de côté, je vous prie, vos intérêts privés ; soyez bon et généreux, avant que l’oppresseur devienne l’opprimé. »

Haml continua d’injurier son frère, en flattant Cais par son admiration, jusque vers le soir, où ils arrivèrent à la tribu de Fazarah. Hadifah, qui en ce moment était entouré de plusieurs chefs puissants sur le secours desquels il comptait au besoin, avait changé d’avis depuis le départ de son frère Haml ; et, au lieu d’entrer en accommodement et de faire la paix avec Cais, il avait au contraire pris la résolution de ne céder en rien, et de maintenir rigoureusement toutes les conditions de la course. Il parlait même de cette affaire avec l’un des chefs, au moment où Cais et Haml se présentèrent devant lui.

Sitôt que Hadifah vit Cais, il résolut de l’accabler de honte. Se tournant donc vers son frère : « Qui t’a ordonné d’aller vers cet homme ? lui demanda-t-il. Par la foi d’un noble Arabe, quand tous les hommes qui couvrent la surface de la terre viendraient m’importuner et me dire : « Ô Hadifah, abandonne un poil de ces chameaux, » je ne l’abandonnerais pas, à moins que la lance n’eût percé ma poitrine et que l’épée n’eût fait sauter ma tête. » Cais devint rouge, et remonta aussitôt à cheval, en reprochant à Haml sa conduite. Il revint en toute hâte chez lui, où il trouva ses oncles et ses frères qui l’attendaient avec une anxiété ex-