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avec un autre, il le montait lui-même, et avait coutume de dire à son antagoniste : « Quand vous partiriez devant moi comme un trait de flèche, je vous rattraperais, je vous dépasserais ; » ce qui arrivait effectivement.

Dès que le roi Cais eut entendu parler de ce cheval, il devint comme hors de lui-même, et le sommeil l’abandonna. Il envoya quelqu’un à Kerim pour l’engager à lui vendre ce poulain pour autant d’or et d’argent qu’il en désirerait, ajoutant que ces richesses lui seraient envoyées sans délai. Ce message enflamma Kerim de colère. « Cais n’est-il donc qu’un sot et un homme mal élevé ? s’écria-t-il. Pense-t-il que je suis un marchand qui vend ses chevaux, et supposerait-il que je suis incapable de les monter moi-même ? Oui, j’en jure par la foi d’un Arabe, s’il m’eût demandé Dahis en présent, je le lui aurais envoyé tout aussitôt, avec un assortiment de chameaux et de chamelles ; mais si c’est par la voie du trafic qu’il compte l’avoir, cela ne sera jamais, dussé-je boire dans la coupe de la mort ! »

Le messager retourna vers Cais, et lui rapporta la réponse de Kerim, ce qui fâcha beaucoup le roi. « Suis-je le roi des tribus d’Abs, d’Adnan, de Fazarah et de Dibyan, s’écria-t-il, et un vil Arabe sera-t-il assez hardi pour me contredire ? » Il fit avertir aussitôt son monde et ses guerriers. À l’instant les armures, les cottes de mailles, les épées et les casques brillèrent ; les héros montèrent leurs coursiers, agitèrent leurs lances, et l’on se mit en marche vers la tribu de Ryah. À peine y furent-ils arrivés dès le matin, qu’ils se jetèrent à travers les pâturages, où ils firent un immense butin en troupeaux, que Cais abandonna à tous