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proverbe de dire : « Gardez-vous d’approcher la tribu de Giaudar. »

Quant à Kaled, il suivait son père Mohareb dans ses exercices journaliers, auxquels prenaient part les plus courageux de la tribu. C’était une guerre véritable, ayant chaque fois ses blessés ; Kaled trouvait un motif d’émulation à devenir un guerrier redoutable, émulation qu’augmentait encore la réputation de valeur de son cousin : il mourait d’envie d’aller le voir, mais n’osait le faire, connaissant les dissensions qui existaient entre leurs parents. À l’âge de quinze ans, Kaled était devenu le plus vaillant guerrier de sa tribu, lorsqu’il eut le malheur de perdre son père : il fut choisi pour le remplacer, et comme il montrait les mêmes vertus que lui, il ne tarda pas à gagner l’estime et la considération générales. Ayant un jour proposé à sa mère d’aller voir son oncle, ils se mirent en route, suivis de riches présents en chevaux, harnais, armes, etc. Zaher les reçut à merveille, et combla de soins et de prévenances son neveu, dont la réputation était arrivée jusqu’à lui. Kaled embrassa tendrement son cousin Giaudar, et prit pour lui un vif attachement pendant le peu de temps qu’il passa chez son oncle ; chaque jour il se livrait à ses exercices militaires, et charmait Giaudar, qui voyait en lui un guerrier accompli, plein de courage et de générosité, affable, éloquent, et d’une mâle beauté ; ils passaient ensemble des journées entières et même la plus grande partie des nuits. À la fin Giaudar s’attacha tellement à Kaled, qu’un jour il entra chez sa mère et lui dit : « Si mon cousin retourne à sa tribu sans moi, j’en mourrai de chagrin, car je l’aime éperdument. — Je suis loin de vous désapprouver, lui répondit sa