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frais et pertes, sans jamais obtenir le moindre dédommagement.

Le lendemain, je me sentis si content d’avoir recouvré ma liberté, que j’allai me promener toute la journée, et visiter en détail Darkisch et ses environs. La ville, bâtie en pierres blanches, contient sept mille habitants, presque tous parents, ministres ou généraux d’Ebn-Sihoud. On n’y voit pas d’artisans. Les seuls métiers qui s’y exercent sont ceux d’armurier et de maréchal ferrant ; encore sont-ils en petit nombre : on ne trouve rien à acheter, pas même sa nourriture. Chacun vit de son avoir, c’est-à-dire, d’une terre ou jardin qui produit du blé, des légumes et des fruits, et nourrit quelques poulets. Leurs nombreux troupeaux paissent dans la plaine, et tous les mercredis les habitants de l’Yémen et de la Mecque viennent échanger leurs marchandises contre des bestiaux. Cette espèce de foire est l’unique commerce du pays. Les femmes sortent sans voile, mais elles mettent leur machlas noir sur leur tête, ce qui est extrêmement disgracieux ; du reste, elles sont généralement laides et brunes à l’excès. Les jardins, situés dans un charmant vallon près de la ville, du côté opposé à celui par lequel nous étions arrivés, produisent les plus beaux fruits du monde : des bananes, oranges, grenades, figues, pommes, melons, etc., entremêlés d’orge et de maïs ; ils sont arrosés avec soin.

Le lendemain, le roi nous ayant fait appeler de nouveau, nous reçut très-gracieusement, et me questionna beaucoup sur les divers souverains d’Europe, surtout sur Napoléon, pour lequel il avait une grande vénération. Le récit de ses