Page:Lamartine - Œuvres complètes de Lamartine, tome 8.djvu/289

Cette page a été validée par deux contributeurs.

nattes, de tapis et de coussins. Les grands de sa cour l’entouraient. L’ameublement ainsi que les habillements étaient en coton ou en laine du Yémen, la soie étant défendue dans ses États, ainsi que tout ce qui rappelle le luxe et les usages des Turcs. J’eus le loisir de faire mes observations ; car Ebn-Sihoud ayant répondu brièvement et d’un ton glacial au compliment du drayhy, nous nous assîmes, et attendîmes en silence qu’il entamât la conversation. Cependant, au bout d’une demi-heure, le drayhy, voyant qu’il ne commandait pas le café et ne se déridait pas, prit la parole, et dit :

« Je vois, ô fils de Sihoud, que vous ne nous recevez pas comme nous avions droit de nous y attendre. Nous avons marché sur vos terres et nous sommes entrés sous votre toit d’après votre invitation : si vous avez quelque chose contre nous, parlez, ne nous cachez rien. »

Ebn-Sihoud, lui lançant un regard de feu :

« Oui certes, répondit-il, j’ai beaucoup de choses contre vous : vos crimes sont impardonnables ! Vous vous êtes révolté contre moi, et vous avez refusé de m’obéir ; vous avez dévasté la tribu de Sachrer en Galilée, sachant qu’elle m’appartenait.

» Vous avez corrompu les Bédouins, et vous les avez réunis contre moi et contre mon autorité.

» Vous avez détruit mes armées, pillé mes camps, et soutenu mes mortels ennemis, les Turcs, ces idolâtres, ces profanateurs, ces scélérats, ces débauchés. »