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partout aussi nous entendîmes des plaintes interminables sur la tyrannie d’Ebn-Sihoud. La crainte seule retenait ces peuples sous sa domination. Enfin, après quatorze jours de marche au pas des dromadaires, ce qui suppose une distance triple de celle d’une caravane dans le même espace de temps, nous arrivâmes dans la capitale des Wahabis. La ville est entourée d’un bois de dattiers ; les arbres se touchent, et laissent à peine le passage d’un cavalier entre leurs troncs ; aussi la ville se dérobe-t-elle derrière ce rempart, appelé les Dattiers de Darkisch. Ayant traversé ce bois, nous trouvâmes comme un second retranchement de monticules formés de noyaux de dattes amoncelés, ressemblant à une digue de petites pierres, et derrière, la muraille de la ville, que nous longeâmes pour arriver à une porte d’entrée qui nous conduisit au palais du roi. Ce palais, fort grand et à deux étages, est bâti en belles pierres de taille blanches. Informé de notre arrivée, Ebn-Sihoud nous fit conduire dans un de ses appartements, élégant et bien meublé, où l’on nous servit un repas copieux.

Nous trouvâmes ce début de bon augure, et nous nous applaudîmes de n’avoir pas cédé aux défiances qu’on avait voulu nous inspirer. Le soir, ayant mis ordre à notre habillement, nous fûmes nous présenter au roi : nous vîmes un homme de quarante-cinq ans environ, l’œil dur, le teint bronzé et la barbe très-noire ; il était vêtu d’une gombaz attachée autour des reins par une ceinture blanche, un turban rayé rouge et blanc sur la tête, un machlas noir jeté sur l’épaule gauche, tenant dans la main droite la baguette du roi Mahlab, insigne de son autorité : il était assis au fond d’une grande salle d’audience assez richement meublée de