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le conjurant d’obtenir les armes du peuple. Il répondit que lui et ses amis étaient prêts à déposer leurs armes, mais qu’il lui était impossible de les arracher aux paysans. Le pacha, indigné, suscita contre lui le président de la chancellerie servienne, Moler, et le métropolitain Nikschwitz ; mais les gardes de Milosch s’emparèrent de ces deux conspirateurs en plein conseil, et forcèrent le pacha lui-même, en vertu de son pouvoir exécutif, à les mettre à mort. L’audace des Serviens s’accrut par cette faiblesse du pacha. Milosch sortit de Belgrade, et, pour échapper aux piéges de tout genre dont les Turcs et ses rivaux parmi les Serviens l’environnaient, se renferma dans le village fortifié de Topschidor, à une demi-lieue de Belgrade. En 1821, une tentative nouvelle eut lieu contre l’autorité et la vie de Milosch. Les deux weyvodes qui l’avaient dirigée furent exécutés. On soupçonna le pacha d’en avoir été l’instigateur, et l’animosité s’accrut entre les deux nations. Cependant les révoltes de l’Albanie et la guerre de l’indépendance de la Grèce occupaient et énervaient les Turcs. Les circonstances étaient favorables à la concentration du pouvoir national en Servie. Les peuples ne conquièrent jamais leur liberté qu’en se personnifiant dans un chef militaire. L’intérêt et la reconnaissance leur font naturellement consacrer l’hérédité du pouvoir dans celui qui a su le créer et le défendre. La monarchie est l’instinct des nations qui naissent : c’est un tuteur qu’elles donnent à leur indépendance encore attaquée. Cet instinct était plus fort en Servie, où les formes républicaines étaient inconnues. Milosch le partageait et devait en profiter. Il étendit son autorité, et rétablit à peu près la constitution de Kara-George. Il jeta entre le peuple et lui l’aristocratie des knevens, chargés de l’administration