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l’ennemi. En attendant ce renfort, le drayhy fit faire l’annonce solennelle de la guerre, selon la coutume des Bédouins dans les grandes occasions ; voici comment : On choisit une chamelle blanche qu’on noircit entièrement avec du noir de fumée et de l’huile ; on lui mit un licou de poil noir, et on la fit monter par une jeune fille habillée de noir, le visage et les mains également noircis. Dix hommes la conduisirent de tribu en tribu ; en arrivant, elle criait trois fois :

— « Renfort ! renfort ! renfort ! Qui de vous blanchira cette chamelle ? Voilà un morceau de la tente du drayhy, qui menace ruine. Courez, courez, grands et généreux défenseurs ! Le Wahabi arrive, il enlèvera vos alliés et vos frères. Vous tous qui m’entendez, adressez vos prières aux prophètes Mahomet et Ali, le premier et le dernier. »

En disant ces mots, elle distribuait des poignées de poil noir, et des lettres du drayhy qui indiquaient le lieu du rendez-vous aux bords de l’Oronte. En peu de temps notre camp fut grossi de trente tribus réunies dans une même plaine : les cordes des tentes se touchaient.

Le pacha de Damas envoya à Hama six mille hommes, commandés par son neveu Ibrahim-Pacha, pour y attendre d’autres troupes que devaient fournir les pachas d’Acre et d’Alep. Elles étaient à peine réunies, qu’on apprit l’arrivée des Wahabis à Palmyre par les habitants qui venaient se réfugier à Hama ; Ibrahim-Pacha écrivit au drayhy, qui se rendit auprès de lui, et ils convinrent ensemble de leur plan de défense. Le drayhy, qui m’avait amené avec lui comme