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servit à boire du lait de chameau, comme on aurait servi de la limonade dans une ville de Syrie. Après le repas, les jeunes gens montèrent à cheval pour se livrer aux jeux du djérid[1] et autres. Giarah se distingua pour plaire à sa fiancée, qui remarqua avec plaisir son agilité et sa bonne grâce. Nous nous séparâmes à l’entrée de la nuit, et chacun ne songea plus qu’aux préparatifs de la noce.

Au bout de trois jours, la dot, ou plutôt le prix de Sabha, était préparé ; un immense cortége se mit en route dans l’ordre suivant : En tête marchait un cavalier avec un drapeau blanc au bout de sa lance ; il criait : « Je porte l’honneur sans tache de Bargiass. » Après lui venaient les chameaux, ornés de guirlandes de fleurs et de feuillage, accompagnés de leurs conducteurs ; puis le nègre à cheval, richement vêtu, entouré d’hommes à pied, et chantant des airs populaires. Derrière eux marchait une troupe de guerriers, armés de fusils qu’ils déchargeaient continuellement. Une femme suivait, portant un grand vase de feu dans lequel elle jetait de l’encens. Puis les brebis à lait, conduites par les bergers chantant ainsi que faisait Chibouk, le frère d’Antar, il y a près de deux mille ans ; car les mœurs des Bédouins ne changent jamais. Venait ensuite la négresse, à cheval, et entourée de deux cents femmes à pied ; ce groupe n’était pas le moins bruyant, car les cris de joie et le chant de noces des femmes arabes sont plus aigus qu’on ne saurait l’exprimer. La marche était fermée par le chameau qui portait le trousseau ; les machlas brodés d’or

  1. Exercice équestre avec des bâtons qui se lancent comme des javelots. Ces bâtons s’appellent djérids.