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hommes, sous la conduite d’un puissant conquérant qui voulait affranchir les Bédouins du joug des Turcs, leur rendre la souveraineté sur tout le pays, et leur ouvrir les trésors de l’Inde. Il assura qu’il n’y avait rien à perdre, mais tout à gagner, dans l’exécution de ce projet, dont le succès dépendait de l’ensemble des forces et de l’harmonie des volontés. Il promit que leurs chameaux seraient payés à un très-haut prix pour les transports d’approvisionnements de cette grande armée, et lui fit envisager le commerce de ces vastes contrées comme devant être pour eux une source d’inépuisables richesses.

Saker entra complétement dans nos vues, mais il fallut encore lui expliquer que le Wahabi[1] pouvait contrarier nos plans ; son fanatisme religieux devait nécessairement s’opposer au passage d’une armée chrétienne, et son esprit de domination, qui le rendait déjà maître du Yemen, de la Mecque et de Médine, devait étendre ses prétentions jusqu’à la Syrie, où les Turcs ne pouvaient lui opposer aucune résistance sérieuse ; que, d’un autre côté, une grande puissance maritime, ennemie de celui que nous voulions favoriser, ferait infailliblement alliance avec lui, et enverrait des forces par mer, pour nous couper le chemin du désert.

Après beaucoup de contestations, dans lesquelles Saker montra autant de jugement que de sagacité, il se rendit entièrement à nos arguments, et promit d’user de toute son influence sur les autres tribus. Il fut convenu qu’il se-

  1. On appelle souvent de ce nom Ebn-Sihoud, roi des Wahabis.