Page:Lamartine - Œuvres complètes de Lamartine, tome 8.djvu/130

Cette page a été validée par deux contributeurs.

d’une caravane qui se rendait à Homs. Nous partîmes le 25 mars, et arrivâmes après six heures de marche à Rastain, qui n’est plus aujourd’hui que le reste d’une ancienne ville considérable ; on n’y voit rien de remarquable. Nous continuâmes notre route, et au bout de six autres heures nous étions à Homs. Yakoub, à qui nous remîmes notre lettre, nous reçut à merveille et nous donna à souper. Son métier était de faire des manteaux noirs, appelés machlas. Après souper, quelques hommes de sa condition vinrent passer la soirée avec lui, prendre le café et fumer. — Un d’eux, serrurier, nommé Naufal, nous parut fort intelligent. Il nous parla des Bédouins, de leur manière de vivre et de faire la guerre ; il nous apprit qu’il passait six mois de l’année dans leurs tribus pour arranger leurs armes, et qu’il avait beaucoup d’amis parmi eux.

Quand nous fûmes seuls, M. Lascaris me dit qu’il avait vu ce soir-là tous ses parents ; et comme je lui témoignais mon étonnement d’apprendre qu’il y eût des Vintimille à Homs : « La rencontre de Naufal, me répondit-il, est plus précieuse pour moi que celle de ma famille entière. »

Il était tard lorsqu’on se retira, et le maître de la maison nous donna un matelas et une couverture pour nous deux. M. Lascaris n’avait jamais couché avec personne ; mais par bonté il insista pour me faire partager ce lit. Ne voulant pas le contrarier, je me plaçai près de lui ; mais sitôt la lumière éteinte, m’enveloppant dans mon machlas, je me glissai à terre, où je passai la nuit. Le lendemain, en nous réveillant, nous nous trouvâmes tous deux couchés de la même manière, M. Lascaris ayant fait comme moi. Il vint m’embras-