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Au bout de quelque temps, nous obtînmes de la lumière et du pain, moyennant un talari ; mais l’immense quantité de puces et autres insectes qui infestaient la prison nous empêchèrent de fermer l’œil toute la nuit. À peine avions-nous le courage de penser au moyen de sortir de cet horrible lieu. À la fin, je me souvins d’un écrivain chrétien, appelé Selim, que je connaissais de réputation pour un homme serviable. Je gagnai un de nos gardiens, qui fut le trouver ; et le lendemain Selim arrangea heureusement cette affaire par un cadeau de soixante talaris au muezzin et d’une cinquantaine de piastres à ses gens. À ce prix nous obtînmes notre liberté.

Cet emprisonnement nous valut l’avantage de connaître Selim et plusieurs autres personnes de Hama, avec lesquelles nous passâmes une vingtaine de jours fort agréablement. La ville est charmante ; l’Oronte la traverse, et la rend gaie et animée ; ses eaux abondantes entretiennent la verdure d’une multitude de jardins. Les habitants sont aimables, vifs et spirituels ; ils aiment la poésie et la cultivent avec succès. On leur a donné le surnom d’oiseaux parlants, qui les caractérise fort bien. M. Lascaris ayant demandé à Selim une lettre de recommandation pour un homme de médiocre condition de Homs, qui pût nous servir de guide, il nous écrivit le billet suivant : « À notre frère Yakoub, salut. Ceux qui vous remettront la présente sont colporteurs, et se rendent chez vous pour vendre leurs marchandises aux environs de Homs : assistez-les autant que vous le pourrez ; vos peines ne seront pas perdues : ce sont de braves gens. Salut. »

M. Lascaris, très-content de cette lettre, voulut profiter