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derrière lui, pour reconnaître ce qu’il y aurait à faire, et jalonner la route des Indes, si sa fortune devait la lui ouvrir.

M. de Lascaris fut cet homme. Il partit avec des instructions secrètes de Napoléon, reçut des sommes nécessaires à son entreprise, et vint s’établir à Alep pour s’y perfectionner dans la langue arabe. Homme de mérite, de talent et de lumière, il feignit une sorte de monomanie, pour se faire excuser son séjour en Syrie, et ses relations obstinées avec tous les Arabes du désert qui arrivaient à Alep. Enfin, après quelques années de préparations, il tenta sa grande et périlleuse entreprise. Il parcourut avec des chances diverses, et sous des déguisements successifs, toutes les tribus de la Mésopotamie, de l’Euphrate, et revint à Alep, riche des connaissances qu’il avait acquises, et des relations politiques qu’il avait préparées pour Napoléon. Mais pendant qu’il accomplissait ainsi sa mission, la fortune renversait son héros, et il apprenait sa chute le jour même où il venait lui rapporter le fruit de sept années de périls et de dévouement. Ce coup imprévu du sort fut mortel à M. de Lascaris. Il passa en Égypte, et mourut au Caire, seul, inconnu, abandonné, laissant ses notes pour unique héritage. On dit que le consul anglais recueillit ces précieux