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change ma marche ; je contremande ma caravane de chameaux à El-Arich, et je me détermine à revenir par la côte de Syrie. Nous levons nos tentes ; j’envoie un présent de cinq cents piastres au couvent, en outre de quinze cents piastres que j’ai payées pour chapelets, reliques, crucifix, etc., et nous prenons de nouveau la route du désert de Saint-Jean.

L’aspect général des environs de Jérusalem peut se peindre en peu de mots : montagnes sans ombre, vallées sans eau, terre sans verdure, rochers sans terreur et sans grandiose ; quelques blocs de pierre grise perçant la terre friable et crevassée ; de temps en temps un figuier auprès, une gazelle ou un chacal se glissant furtivement entre les brisures de la roche ; quelques plants de vigne rampant sur la cendre grise ou rougeâtre du sol ; de loin en loin un bouquet de pâles oliviers jetant une petite tache d’ombre sur les flancs escarpés d’une colline ; à l’horizon, un térébinthe ou un noir caroubier se détachant triste et seul du bleu du ciel ; les murs et les tours grises des fortifications de la ville apparaissant de loin sur la crête de Sion ; voilà la terre. Un ciel élevé, pur, net, profond, où jamais le moindre nuage ne flotte, et ne se colore de la pourpre du soir et du matin. Du côté de l’Arabie, un large gouffre descendant entre les montagnes noires, et conduisant les regards jusqu’aux flots éblouissants de la mer Morte et à l’horizon violet des cimes des montagnes de Moab. Pas un souffle de vent murmurant dans les créneaux ou entre les branches sèches des oliviers ; pas un oiseau chantant ni un grillon criant dans le sillon sans herbe : un silence complet, éternel, dans la ville, sur les chemins, dans la campagne.