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21 juin 1833.


À onze heures nous abordâmes à l’échelle du vieux sérail, et nous entrâmes dans les rues qui l’enveloppent. Je visitai en passant le divan de la Porte, vaste palais où se tient le grand vizir et où se discute la politique de l’empire : cela n’a rien de remarquable que l’impression des scènes dont ce lieu fut le théâtre ; rien dans le caractère de l’édifice ne rappelle tant de drames sanglants. C’est un grand palais de bois peint, avec un escalier extérieur, couvert d’un avant-toit découpé en festons à la manière des Indes ou de la Chine. Les salles sont nues, et recouvertes de nattes. Nous descendîmes de là dans la place où la redoutable porte du sérail s’ouvrit si souvent pour vomir les têtes sanglantes des vizirs ou même des sultans. Nous franchîmes cette porte sans obstacle. Le public entre dans la première cour du sérail. Cette vaste cour, plantée de groupes de beaux arbres, descend sur la gauche vers un magnifique hôtel des monnaies, bâtiment moderne, sans aucun caractère oriental.

Les Arméniens, directeurs de la monnaie, nous reçurent, et nous ouvrirent les cassettes où les bijoux qu’ils font fabriquer pour le sérail étaient renfermés. Pluie de perles et de diamants, richesses pauvres, qui ruinent un empire ! Dès qu’un État se civilise, ces représentations idéales de la richesse s’échangent contre la richesse réelle et productive, la terre et le crédit. J’y reste peu : nous entrons dans la der-