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qu’il passa ces heures terribles de l’agonie, lutte ineffable entre la vie et la mort, entre la volonté divine et l’instinct humain, entre l’âme et la matière ! c’est là qu’il sua le sang et l’eau, et que, las de combattre avec lui-même sans que la victoire de l’intelligence donnât la paix à ses pensées, il dit ces paroles finales, ces paroles qui résument tout l’homme et tout le Dieu, ces paroles qui sont devenues la sagesse de tous les sages, et qui devraient être l’épitaphe de toutes les vies, et l’inscription unique de toutes les choses créées : « Mon Père, que votre volonté soit faite, et non la mienne ! »

Le site de cette grotte, creusée dans le rocher du Cédron, est un des sites les plus probables et les mieux justifiés par l’aspect des lieux, de tous ceux que la pieuse crédulité populaire a assignés à chacune des scènes du drame évangélique : c’est bien là la vallée assise à l’ombre de la mort, l’abîme caché sous les murs de la ville, le creux le plus profond et vraisemblablement alors le plus fui des hommes, où le Christ, qui devait avoir tous les hommes pour ennemis parce qu’il venait attaquer tous leurs mensonges, dut chercher quelquefois un abri et se recueillir en lui-même pour méditer, pour prier et pour souffrir ! Le torrent impur de Cédron coule à quelques pas. Ce n’était alors qu’un égout de Jérusalem ; la colline des Oliviers s’y replie pour se joindre avec les collines qui portent le tombeau des rois, et forme là comme un coude enfoncé, où des masses d’oliviers, de térébinthes et de figuiers, et ces arbres fruitiers que le pauvre peuple cultive toujours, dans la poussière même du rocher, aux alentours d’une grande ville, devaient cacher l’entrée de la grotte : de plus, ce site ne fut pas remué et