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mains, comme des reliques précieuses, et qui sont d’un prix inestimable. La lame de celui dont on m’a fait présent a coûté cinq mille piastres au pacha. Les Turcs et les Arabes, qui estiment ces lames plus que les diamants, sacrifieraient tout au monde pour une pareille arme ; leurs regards étincellent d’enthousiasme et de vénération quand ils voient la mienne, et ils la portent à leur front, comme s’ils adoraient un si parfait instrument de mort.

Les bijoutiers n’ont aucun art et aucun goût dans l’ajustement de leurs pierres précieuses ou de leurs perles ; mais ils possèdent, en ce genre, d’immenses collections. Toute la richesse des Orientaux est mobilière, pour être enfouissable ou portative. Il y a une grande quantité de ces orfévres ; ils étalent peu : tout est renfermé dans de petites cassettes qu’ils ouvrent quand on leur demande un bijou.

Les selliers sont les plus nombreux et les plus ingénieux ouvriers de ces bazars : rien n’égale, en Europe, le goût, la grâce et la richesse des harnais de luxe qu’ils façonnent pour les chevaux des chefs arabes ou des agas du pays. Les selles sont revêtues de velours et de soie brochée d’or et de perles. Les colliers de maroquin rouge, qui tombent en frange sur le poitrail, sont ornés également de glands d’argent et d’or et de touffes de perles. Les brides, infiniment plus élégantes que les nôtres, sont aussi toutes de maroquin de diverses couleurs, et décorées de glands de soie et d’or. Tous ces objets sont, comparativement avec l’Europe, à très-bas prix. J’ai acheté deux de ces brides les plus magnifiques pour cent vingt piastres les deux (environ cinquante francs).