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et déshéritent ainsi un homme jeune, intelligent, probe, serviable, courageux et actif, qui rend et rendrait les plus grands services à sa patrie. Ils le perdront !

J’avais connu M. Baudin en Syrie l’année précédente, et j’avais concerté avec lui mon voyage à Damas. Instruit de mon départ et de ma prochaine arrivée, je lui expédie ce matin un Arabe pour l’informer de l’heure où je serai aux environs de la ville, et le prier de m’envoyer un guide pour diriger mes pas et mes démarches.

À neuf heures du matin, nous côtoyons une montagne couverte de maisons de campagne et de jardins des habitants de Damas. Un beau pont traverse un torrent au pied de la montagne. Nous voyons de nombreuses files de chameaux qui portent des pierres pour des constructions nouvelles ; tout indique l’approche d’une grande capitale : une heure plus loin, nous apercevons, au sommet d’une éminence, une petite mosquée isolée, demeure d’un solitaire mahométan ; une fontaine coule auprès de la mosquée, et des tasses de cuivre, enchaînées au massif de la fontaine, permettent au voyageur de se désaltérer. Nous faisons halte un moment dans cet endroit, à l’ombre d’un sycomore ; déjà la route est couverte de voyageurs, de paysans et de soldats arabes. Nous remontons à cheval, et, après avoir gravi quelques centaines de pas, nous entrons dans un défilé profond, encaissé à gauche par une montagne de schiste perpendiculaire sur nos têtes ; à droite, par un rebord de rocher de trente à quarante pieds d’élévation ; la descente est rapide, et les pierres roulantes glissent sous les pieds de nos chevaux.