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Mais tout ce qui montait de son cœur était doux,
Et sa lèvre jamais n’avait un pli sévère
Qu’en joignant ses deux mains dans les mains de sa mère,

Pour prier Dieu sur ses genoux !


Je rêvais qu’en ces lieux je l’avais amenée,
Et que je la tenais belle sur mon genou,
L’un de mes bras portant ses pieds, l’autre son cou ;
Ma tête sur son front tendrement inclinée.
Ce front, se renversant sur le bras paternel,
Secouait l’air bruni de ses tresses soyeuses ;
Ses dents blanches brillaient sous ses lèvres rieuses,

Qu’entr’ouvrait leur rire éternel.


Pour me darder son cœur et pour puiser mon âme,
Toujours vers moi, toujours ses regards se levaient,
Et dans le doux rayon dont mes yeux la couvraient,
Dieu seul peut mesurer ce qu’il brillait de flamme.
Mes lèvres ne savaient d’amour où se poser ;
Elle les appelait comme un enfant qui joue,
Et les faisait flotter de sa bouche à sa joue,

Qu’elle dérobait au baiser !


Et je disais à Dieu, dans ce cœur qu’elle enivre :
« Mon Dieu ! tant que ces yeux luiront autour de moi,
Je n’aurai que des chants et des grâces pour toi :
Dans cette vie en fleurs c’est assez de revivre.
Va, donne-lui ma part de tes dons les plus doux,
Effeuille sous mes pas ses jours en espérance,
Prépare-lui sa couche, entr’ouvre-lui d’avance

Les bras enchaînés d’un époux ! »