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Devant la porte est un large banc de boue séchée, où l’on étend un tapis pour le chef. Il s’y établit dès le matin, entouré de ses principaux esclaves et visité par ses amis. Le café et la pipe y fument sans cesse. Une grande cour remplie de chevaux, de chameaux, de chèvres et de vaches, entoure la maison. Il y a toujours deux ou trois belles juments sellées et bridées pour les courses du maître.

Nous ne nous arrêtâmes que quelques moments près du palais de boue du scheik, qui nous offrit de l’eau, du café, la pipe, et fit égorger un veau et plusieurs moutons pour notre caravane. Nous reçûmes aussi en présent des grains de doura grillés, des poulets et des pastèques ; nous repartîmes précédés du scheik et de quinze à vingt des principaux Arabes de la ville ; nous trouvâmes quelques champs de maïs et de doura bien cultivés aux environs de Jéricho : quelques jardins d’orangers et de grenadiers, quelques beaux palmiers entourent aussi les maisons éparses autour de la ville ; puis tout redevient désert et sable. Ce désert est une immense plaine à plusieurs gradins qui vont en s’abaissant successivement jusqu’au fleuve du Jourdain, par des degrés réguliers comme les marches d’un escalier naturel ; l’œil ne voit qu’une plaine unie ; mais, après avoir marché une heure, on se trouve tout à coup au bord d’une de ces terrasses ; on descend par une pente rapide ; on marche une heure encore, puis une nouvelle descente, et ainsi de suite. Le sol est un sable blanc, solide, et recouvert d’une croûte concrète et saline produite, sans doute, par les brouillards de la mer Morte, qui, en s’évaporant, laissent cette croûte de sel ; il n’y a ni pierre ni terre, excepté en approchant des bords du fleuve ou des montagnes ; on a partout un