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pellent Fatalité. Placez un Turc entre dix Européens, vous le reconnaîtrez toujours à l’élévation du regard, à la gravité de la pensée imprimée sur ses traits par l’habitude, et à la noble simplicité de l’expression. Le gouverneur avait reçu de Méhémet-Ali et d’Ibrahim-Pacha des lettres qui me recommandaient fortement à lui. J’ai ces lettres. Je lui en fis lire une autre d’Ibrahim, que je portais avec moi. En voici le sens :

« Je suis informé que notre ami (ici mon nom) est arrivé de France avec sa famille et plusieurs compagnons de voyage, pour parcourir les pays soumis à mes armes, et connaître nos lois et nos mœurs. Mon intention est que toi, et tous mes gouverneurs de ville ou de province, les commandants de mes flottes, les généraux et officiers commandant mes armées, vous lui donniez toutes les marques d’amitié, vous lui rendiez tous les services que mon affection pour lui et pour sa nation me commande. Vous lui fournirez, s’il le demande, les maisons, les chevaux, les vivres dont il aura besoin, lui et sa suite ; vous lui procurerez les moyens de visiter toutes les parties de nos États qu’il désirera voir ; vous lui donnerez des escortes aussi nombreuses que sa sûreté, dont vous répondez sur votre tête, l’exigera ; et si même il éprouvait des difficultés à pénétrer dans certaines provinces de notre domination par le fait des Arabes, vous ferez marcher vos troupes pour assurer ses excursions, etc. »

Le gouverneur porta cette lettre à son front après l’avoir lue, et me la remit. Il me demanda ce qu’il pouvait faire pour obéir convenablement aux injonctions de son maître,