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principale, est décorée de houppes flottantes et de cordons de soie ; ils la tiennent ordinairement dans la main droite, le fer vers le ciel, et la tige touchant presque à terre ; mais quand ils lancent leurs chevaux au galop, ils la brandissent horizontalement au-dessus de leur tête ; et dans leurs jeux militaires ils la lancent à une distance énorme, et vont la ramasser en se penchant jusqu’à terre. Avant de la lancer, ils lui impriment longtemps un mouvement d’oscillation qui ajoute ensuite beaucoup à la force du jet, et la fait porter jusqu’à un but qu’ils désignent. Nous rencontrâmes un assez grand nombre de ces cavaliers dans la journée. L’émir Beschir nous en avait donné lui-même quelques-uns pour nous guider et nous faire honneur ; tous nous saluèrent avec une extrême politesse, et arrêtèrent leurs chevaux pour nous laisser le sentier.

Environ à deux milles de Deïr-el-Kammar, on a une des plus belles vues du Liban que l’on puisse imaginer. D’un côté, ses gorges profondes, où l’on va descendre, s’ouvrent tout à coup sous vos pas. De l’autre, le château de Dptédin pyramide au sommet de son mamelon, revêtu de verdure et sillonné d’eaux écumantes ; et devant vous les montagnes qui s’abaissent graduellement jusqu’à la mer, les unes noires, les autres frappées par la lumière, se déroulent comme une cataracte de collines, et vont cacher leurs pieds soit dans les lisières verdoyantes de bois d’oliviers dans les plaines de Sidon, soit dans des falaises d’un sable couleur de brique, le long des rivages de Bayruth. Çà et là, la couleur des flancs de ces montagnes et les lignes variées de leur immense horizon descendant, sont tranchées et coupées par des cimes de cèdres, de sapins ou de pins à