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un officier turc, au nom du pacha de Damas, que le prince du Liban lui pardonnait, il se remit entre ses mains, et fut conduit à Damas. Là on le dépouilla de ses habits, on lui lia les mains, l’une sur la poitrine, l’autre sur le dos, et on le jeta dans une prison, où il resta plusieurs mois. On instruisit son procès à Constantinople, et il fut condamné à mort. Lorsqu’on lui présenta le cordon, il ne pâlit pas, et demanda seulement à parler au pacha et au prince : on lui répondit que c’était inutile ; que ni l’un ni l’autre ne pouvaient plus rien, la condamnation émanant de Constantinople. Alors le scheik Beschir se soumit à sa destinée. Il fut étranglé, puis décapité, et son corps coupé en morceaux et jeté aux chiens.

Cette exécution eut lieu au commencement de 1824. Les trois frères du prince furent ensuite arrêtés ; on leur coupa la langue et on leur creva les yeux, puis ils furent exilés avec leurs familles, chacun dans un village éloigné l’un de l’autre. Depuis lors la tranquillité régna au Liban, les Chab jouirent en paix du pouvoir, grâce à la police active que l’émir établit dans son gouvernement, et à l’amitié d’Abdalla-Pacha, qui n’ignorait cependant pas les liens intimes qui unissaient le grand prince à Méhémet-Ali.

Telle est la politique qu’a suivie jusqu’à ce jour l’émir Beschir, et tout annonce qu’il la suivra encore avec succès dans la nouvelle crise où l’a placé la lutte de Méhémet-Ali contre l’empire ottoman. L’émir n’a pris aucune part à la guerre jusqu’au moment où Ibrahim-Pacha, vainqueur de Saint-Jean d’Acre, a envoyé Abdalla-Pacha, vaincu et prisonnier, à son père, en Égypte, et est entré en Syrie : le