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partement était plus élevée d’environ un pied, et un large divan de velours rouge régnait tout autour. L’émir était accroupi à l’angle de ce divan. — C’était un beau vieillard à l’œil vif et pénétrant, au teint frais et animé, à la barbe grise et ondoyante ; une robe blanche, serrée par une ceinture de cachemire, le couvrait tout entier, et le manche éclatant d’un long et large poignard sortait des plis de sa robe à la hauteur de la poitrine, et portait une gerbe de diamants de la grosseur d’une orange. — Nous le saluâmes à la manière du pays, en portant notre main au front d’abord, puis sur le cœur ; il nous rendit notre salut avec grâce et en souriant, et nous fit signe de nous approcher, et de nous asseoir près de lui sur le divan. — Un interprète était à genoux entre lui et nous. — Je pris la parole, et lui exprimai le plaisir que j’éprouvais à visiter l’intéressante et belle contrée qu’il gouvernait avec tant de fermeté et de sagesse, et lui dis, entre autres choses, que le plus bel éloge que je pouvais faire de son administration, c’était de me trouver là ; que la sûreté des routes, la richesse de la culture, l’ordre et la paix dans les villes, étaient les témoignages parlants de la vertu et de l’habileté du prince. — Il me remercia, et me fit sur l’Europe, et principalement sur la politique de l’Europe dans la lutte des Turcs et des Égyptiens, une foule de demandes qui montraient à la fois tout l’intérêt que cette question avait pour lui, et les connaissances et l’intelligence des affaires, peu communes dans un prince de l’Orient. On apporta le café, les longues pipes, qu’on renouvela plusieurs fois, et la conversation continua pendant près d’une heure.

Je fus ravi de la sagesse, des lumières, des manières no-