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lui-même. — Voilà pourquoi je suis chrétien, voilà toute ma controverse religieuse avec moi-même ; avec les autres je n’en ai point : on ne prouve à l’homme que ce qu’il croit déjà. — Mais enfin, reprit-elle, trouvez-vous donc le monde social, politique et religieux, bien ordonné ? et ne sentez-vous pas ce que tout le monde sent, le besoin, la nécessité d’un révélateur, d’un rédempteur, du Messie que nous attendons, et que nous voyons déjà dans nos désirs ? — Oh ! pour cela, lui dis-je, c’est une autre question. — Nul plus que moi ne souffre et ne gémit du gémissement universel de la nature, des hommes et des sociétés. — Nul ne confesse plus haut les énormes abus sociaux, politiques et religieux. — Nul ne désire et n’espère davantage un réparateur à ces maux intolérables de l’humanité. — Nul n’est plus convaincu que ce réparateur ne peut être que divin ! — Si vous appelez cela attendre un Messie, je l’attends comme vous, et plus que vous je soupire après sa prochaine apparition ; comme vous, et plus que vous, je vois dans les croyances ébranlées de l’homme, dans le tumulte de ses idées, dans le vide de son cœur, dans la dépravation de son état social, dans les tremblements répétés de ses institutions politiques, tous les symptômes d’un bouleversement, et par conséquent d’un renouvellement prochain et imminent. Je crois que Dieu se montre toujours au moment précis où tout ce qui est humain est insuffisant, où l’homme confesse qu’il ne peut rien pour lui-même. — Le monde en est là. Je crois donc à un Messie voisin de notre époque ; mais dans ce Messie je ne vois point le Christ, qui n’a rien de plus à nous donner en sagesse, en vertu et en vérité ; je vois celui que le Christ a annoncé devoir venir après lui. — Cet esprit saint toujours agissant, toujours assistant l’homme, toujours lui révélant, selon le