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elle. — Des arbres pour s’asseoir à leur ombre, des fontaines jaillissantes pour rêver à leur bruit ; du silence, et des mosquées aux légers minarets s’élevant à chaque pas du sein d’une terre pieuse : — voilà tout ce qu’il faut à ce peuple ; il ne sort de cette douce apathie que pour monter ses coursiers du désert, les premiers serviteurs de l’homme, et pour voler sans peur à la mort pour son prophète et pour son Dieu. Le dogme du fatalisme en a fait le peuple le plus brave du monde ; et quoique la vie lui soit légère et douce, celle que lui promet le Koran, pour prix d’une vie donnée pour sa cause, est tellement mieux rêvée encore, qu’il n’a qu’un faible effort à faire pour s’élancer de ce monde au monde céleste qu’il voit devant lui, rayonnant de beauté, de repos et d’amour ! C’est la religion des héros ; mais cette religion pâlit dans la foi du musulman, et l’héroïsme s’éteint avec la foi qui est son principe : à mesure que les peuples croiront moins, soit à un dogme, soit à une idée, ils mourront moins volontiers et moins noblement. — C’est comme en Europe : pourquoi mourir, si la vie vaut mieux que la mort ; s’il n’y a rien d’immortel à gagner en s’immolant à un devoir ? Aussi la guerre va diminuer et s’éteindre en Europe, jusqu’à ce qu’une foi se ranime, et parle dans le cœur de l’homme plus haut que le vil instinct de la vie.

Ravissantes figures de femmes vues le soir assises sur les terrasses, au clair de la lune. — C’est l’œil des femmes d’Italie, mais plus doux, plus timide, plus pénétré de tendresse et d’amour ; — c’est la taille des femmes grecques, mais plus arrondie, plus assouplie, avec des mouvements plus suaves, plus gracieux. — Leur front est large, uni,