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de reconnaissance de ses bontés, à Athènes. — Un autre esclave apporta alors le café dans de très-petites tasses de porcelaine de la Chine, contenues elles-mêmes dans de petits réseaux de fil d’argent doré.

La figure de ce Turc avait le caractère que j’ai reconnu depuis dans toutes les figures des musulmans que j’ai eu occasion de voir en Syrie et en Turquie : — noblesse, douceur, et cette résignation calme et sereine que donne à ces hommes la doctrine de la prédestination, et aux vrais chrétiens la foi dans la Providence ; — même culte de la volonté divine : — l’un, poussé jusqu’à l’absurde et jusqu’à l’erreur ; — l’autre, expression triste et vraie de l’universelle et miséricordieuse sagesse qui préside à la destinée de tout ce qu’elle a daigné créer. Si une conviction pouvait être une vertu, le fatalisme, ou plutôt le providentisme, serait la mienne ! Je crois à l’action complète, toujours agissante, toujours présente, de la volonté de Dieu ; — le mal seul s’oppose en nous à ce que cette volonté divine produise toujours le bien. Aussitôt que notre destinée est altérée, gâtée, pervertie, si nous regardons bien, nous reconnaîtrons toujours que c’est par une volonté de nous, une volonté humaine, c’est-à-dire corrompue et perverse ; si nous laissions agir la seule volonté toujours bonne, nous serions toujours bons et toujours heureux nous-mêmes : le mal n’existerait pas ! Les dogmes du Koran ne sont que du christianisme altéré, mais cette altération n’a pas pu les dénaturer entièrement. Le peuple est plein de vertus ; je l’aime ce peuple, car c’est le peuple de la prière !