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de barbarie qu’il lui fallut traverser pour arriver à nous l’ont souvent altéré et défiguré ; mais s’il était tombé sur des Platon et des Pythagore, où ne serions-nous pas arrivés ? Nous arriverons, grâce à lui, par lui et avec lui.

Le calme s’établit, et nous nageons six heures sans mouvement sur la mer transparente et dans les vapeurs colorées de la mer d’Athènes. L’Acropolis et le Parthénon, semblables à un autel, s’élèvent à trois lieues devant nous, détachés du mont Penthélique, du mont Hymette et du mont Anchesmus ; — en effet, Athènes est un autel aux dieux, le plus beau piédestal sur lequel les siècles passés aient pu placer la statue de l’Humanité ! Aujourd’hui l’aspect est sombre, triste, noir, aride, désolé ; un poids sur le cœur ; rien de vivant, de vert, de gracieux, d’animé ; nature épuisée, que Dieu seul pourrait vivifier : la liberté n’y suffira pas. — Pour le poëte et pour le peintre, il est écrit sur ces montagnes stériles, sur ces caps blanchissants de temples écroulés, sur ces landes marécageuses ou rocailleuses qui n’ont plus rien que des noms sonores, il est écrit : « C’est fini ! » Terre apocalyptique qui semble frappée par quelque, malédiction divine, par quelque grande parole de prophète ; Jérusalem des nations, dans laquelle il n’y a plus même de tombeau ; voilà l’impression d’Athènes et de tous les rivages de l’Attique, des îles et du Péloponèse.

Arrivés au Pirée à huit heures du matin, le 19 août, nous jetons l’ancre. Les chevaux nous attendaient sur la plage du Pirée ; nous montons à cheval. — Je trouve un âne, où nous plaçons une selle de femme pour Julia ; nous partons. Pendant une demi-lieue, la plaine, quoique d’un sol