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Des troubles inconnus dans tous mes sens restés,
Quelques mots de tes vers au hasard répétés,
Et Marthe, et Jocelyn, et sa mère, et Laurence,
Et ce chien dont l’instinct d’une âme a l’apparence,
Êtres créés par toi, dans ma famille admis,
Nés d’hier seulement, et déjà vieux amis ;
Ce drame, qui d’amour et de pleurs se compose,
La mort, dont la pensée épouvante et repose,
L’homme esclave du corps, l’être immatériel,
Le combat sur la terre et le triomphe au ciel,
Et partout tant d’éclat, que des jeunes années
On croit voir reverdir toutes les fleurs fanées :
Voilà les sentiments qui me viennent de toi,
Voilà ce que ton livre a fait passer en moi.

À Byron, barde anglais, toi, poëte de France,
On te compare, ainsi que la belle espérance
Au sombre désespoir ; et c’est avec raison
Que l’univers a fait cette comparaison.
Ta poésie est tout, rayon, flamme, mystère,
Ce qui pare, colore ou parfume la terre ;
C’est le vent de l’aurore et la brise des soirs,
Les nuages montant de l’or des encensoirs,
La fleur entre les noirs barreaux de l’esclavage,
Les perles que la mer roule sur son rivage,
Le cygne sur le lac, l'aigle au-dessus des monts,
Ce que nous dit tout bas le cœur, quand nous aimons ;
Tantôt la vérité, tantôt la parabole,
Et toujours de la vie un éclatant symbole.

Il faut l’accord céleste à nos claviers humains,
Et les notes du ciel bondissent sous tes mains.