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Ce n’est pas vous non plus, vous que pourtant je pleure,
Premier bouillonnement de l’onde intérieure,
Voix du cœur qui chantais en t’éveillant en moi,
Mélodieux murmure embaumé d’ambroisie
Qui fait rendre à sa source un vent de poésie !…
Ô gloire, c’est encor moins toi !

De mes jours sans regret que l’hiver vous remporte
Avec le chaume vide, avec la feuille morte,
Avec la renommée, écho vide et moqueur !
Ces herbes du sentier sont des plantes divines
Qui parfument les pieds : oui ! mais dont les racines
Ne s’enfoncent pas dans le cœur !

Guirlandes du festin que pour un soir on cueille,
Que la haine empoisonne ou que l’envie effeuille,
Dont vingt fois sous les mains la couronne se rompt,
Qui donnent à la vie un moment de vertige,
Mais dont la fleur d’emprunt ne tient pas à la tige,
Et qui sèche en tombant du front.




C’est le jour où ta voix dans la vallée en larmes
Sonnait le désespoir après le glas d’alarmes,
Où deux cercueils passant sous les coteaux en deuil,
Et bercés sur des cœurs par des sanglots de femmes,
Dans un double sépulcre enfermèrent trois âmes
Et m’oublièrent sur le seuil !