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« Ne nous jouons-nous pas où le dauphin se joue ?
N’entrelaçons-nous pas, comme d’humbles roseaux,
Le pin durci du pôle au chêne qui le noue
Pour nous bercer aux vents dans les vallons des eaux ?
N’emprisonnons-nous pas dans la toile sonore
L’aile de la tempête, et, sur les flots amers,
N’aimons-nous pas à voir le jour nomade éclore
De toutes les vagues des mers ?

« Le coursier aux crins noirs, trône vivant des braves.
Ne nous nomine-t-il pas dans ses hennissements ?
Nos bardes n’ont-ils pas des chants tristes et graves.
Des harpes de Morven vieux retentissements ?
N’en composent-ils pas les cordes les plus douces
Avec les pleurs de l’homme et le sang des héros,
Le vent plaintif du Nord qui siffle sur les mousses,
Le chien qui hurle aux bords des flots ?

« Le poli de l’acier, l’éclair de l’arme nue.
Ne caressent-ils pas nos mains et nos regards ?
Est-il un horizon plus doux à notre vue
Qu’un soleil de combats sur des épis de dards ?
Le passé dans nos cœurs n’a-t-il pas des racines
Qu’on ne peut extirper ni secouer du sol ?
Et ne restons-nous pas rochers sous les ruines.
Quand la poussière a pris son vol ?…

« Reconnaissons-nous donc, ô fils des mêmes pères !
Le sang de nos aïeux là-haut nous avouera ;
Que l’hydromel natal écume dans nos verres.
Et poussons dans le ciel trois sublimes hourrah !