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Oh ! quand j’ai lu ce nom qui remplissait naguère
De joie et de clarté mon oreille et mon cœur,
Ce nom que j’ai scellé sur mes lèvres de père
Comme un mystère de douleur !
Quand je l’ai lu gravé sur ta funèbre page,
Un nuage à mes yeux de mon cœur a monté,
Et j’ai dit en moi-même : « Il n’est donc nulle plage »
Où quelque ange ne l’ait porté ? »

Et qu’ai-je fait, dis-moi, pour mériter, ô barde,
Que ton front se couvrit de cendre avec le mien ?
Dieu n’avait pas remis cette enfant sous ta garde,
Mon bonheur n’était pas le tien !
Nous parlons ici-bas des langues étrangères,
L’onde de mes torrents n’est pas l’eau que tu bois ;
Mais l’âme comprend l’âme, et la pitié rend frères
Tous ceux dont le cœur est la voix.

Toute voix qui la nomme entre au fond de mon âme ;
Je ne puis sans pâlir en entendre le son :
Et j’adore de l’œil jusqu’aux lettres de flamme
Qui composaient son divin nom !
Le jour, la nuit, tout haut ma bouche les épelle,
Comme si dans leur sens ces lettres l’enfermaient !
Il semble à mon amour que quelque chose d’elle
Vit dans ces sons qui la nommaient.

Oh ! si comme mon cœur, si tu l’avais connue !
Si dans le plus divin de tes songes d’amant
Cette forme angélique une heure était venue
Luire devant toi seulement ;