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Du poëte c’est le mystère :
Le luthier qui crée une voix
Jette son instrument à terre,
Foule aux pieds, brise comme un verre
L’œuvre chantante de ses doigts ;

Puis, d’une main que l’art inspire,
Rajustant ces fragments meurtris,
Réveille le son et l’admire,
Et trouve une voix à sa lyre
Plus sonore dans ses débris !…

Ainsi le cœur n’a de murmures
Que brisé sous les pieds du sort !
L’âme chante dans les tortures,
Et chacune de ses blessures
Lui donne un plus sublime accord !

Sur la lyre où ton front s’appuie
Laisse donc résonner tes pleurs !
L’avenir, du barde est la vie ;
Et les pleurs que la gloire essuie
Sont le seul baume à ses douleurs !