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CHAPITRE PREMIER.

vrages, mais un homme qui se respecte doit venger ses sentiments méconnus. Fidèle à ce principe, M. de Lamartine n’a jamais répondu aux critiques littéraires que par le silence ; mais il repousse avec raison des opinions et des sentiments que l’erreur seule peut’lui imputer.

« Le passage inculpé est une imprécation poétique contre l’Italie en général ; imprécation que prononce Child Harold au moment où, quittant pour jamais les contrées de l’Europe, contre lesquelles sa misanthropie s’exhalait souvent avec toutes les expressions de la haine, il s’élançait vers un pays où son imagination désenchantée lui promettait des émotions nouvelles. Cette imprécation renferme ce que renferme toute imprécation, c’est-à-dire tout ce que l’imagination d’un poëte, quand il rencontre un pareil sujet, peut lui fournir de plus fort, de plus général, de plus exagéré, de plus vague, contre la chose ou le pays sur lesquels s’exerce la fureur poétique de son héros. Si l’on veut une idée juste d’une pareille figure, qu’on lise les diatribes d’Alfieri contre la France, son langage, ses mœurs, ses habitants ; les imprécations de Corneille contre Rome, celles de Dante, de Pétrarque, et de presque tous les poëtes italiens contre leur propre patrie, celles même de lord Byron contre quelques-uns de ses compatriotes ; qu’on lise enfin tous les satiriques de tous les siècles, depuis Juvénal jusqu’à Gilbert. De pareils morceaux n’ont jamais rien prouvé, que le plus ou moins de talent de leurs auteurs à se pénétrer des couleurs de leur sujet, ou à exercer leur