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FIOR D’ALIZA.

et à ma tante, mais cela me rend toute honteuse. Comment une fille si innocente et si simple que j’étais a-t-elle pu avoir tant de ruse ? Ah ! c’est l’ange de la parenté et de l’amour ; ce n’est pas moi ; mais enfin voilà.

CCXLVIII

Je ne me couchai pas, vous pensez bien, n’est-ce pas ? Je me jetai tout habillée sur mon lit ; je fermai les yeux et je recueillis en moi toutes mes forces dans ma tête pour inventer le moyen de nous sauver ensemble ou de le faire sauver au dernier moment, en le trompant innocemment lui-même et en mourant pour lui toute seule. Et voici ce que mon ange me dicta dans l’oreille, comme si une voix claire et divine m’eût parlé tout bas ; car, encore une fois, ce n’était pas moi qui discutais avec moi-même ; mes lèvres étaient fermées et la parole d’en haut me parlait sans me laisser répondre et comme si quelqu’un m’avait commandée. Je le crus du moins, et voila pourquoi je n’essayai même pas de contredire cette voix qui portait avec elle la conviction.

Le sauver tout seul en te laissant mourir ou captive à sa place, cela ne se peut pas, disait en moi la voix céleste ; tu sens bien qu’il n’y consentirait jamais, lui qui t’aime plus que sa vie et qui a risqué sa liberté et sa vie pour te