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CHAPITRE VIII.

même d’y passer. Les murs avaient deux brasses d’épaisseur ; ils étaient construits de blocs de marbre noir aussi lourds que nos rochers, pour que les condamnés a mort qu’on y abandonnait seuls avec Dieu ne pussent pas songer seulement a s’évader. Un confessionnal et un banc de bois noir étaient les seuls meubles de l’oratoire. Un capucin venait tous les matins, a l’aube du jour, dire la messe pour tous les prisonniers ; ils l’entendaient, à travers la porte ouverte, chacun, de sa lucarne ouvrant sous le cloître ; cela les consolait de voir et d’entendre qu’on priait du moins pour eux ; c’était moi qui servais la messe du capucin, armée d’une petite sonnette de cuivre qu’on m’avait appris à sonner à l’élévation ; c’était moi qui lui versais le vin et l’eau des burettes dans le calice. Quand il avait fini, on fermait la porte de l’oratoire en dehors avec de gros verrous et un cadenas ; moi seule, comme porte-clefs, je pouvais y entrer quelques moments avant la messe du lendemain pour allumer les deux petits cierges, remettre de l’huile dans la lampe, et du vin et de l’eau dans les burettes du vieux prêtre à moitié aveugle.

CCXXI

Ah ! ce fut un beau moment, ma tante que celui où, du haut de ma chambre, dans ma tour, j’entendis le bargello