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CHAPITRE IV.

gelée d’hiver, se réunissaient en tourbillon dans l’air au-dessus de la maison nue, et allaient et venaient comme des fous en jetant de petits cris désespérés ; on eût dit qu’un renard était entré furtivement dans leur nid et avait mangé leurs œufs pendant qu’ils étaient sortis de l’arbre.

CII

Ainsi chaque jour resserrait notre pauvre vie ; mais ce fut bien pis, quelques semaines après, quand les quenouilles de maïs furent mûres et que la seconde récolte des feuilles de mûrier demanda à être cueillie. Tous les jours, comme si nous avions été des voleurs, des agents du sbire rôdaient ici et la dans nos alentours, épiant les chèvres et les moutons qui nous donnaient le lait et la laine dans notre pauvreté toujours croissante ; l’huile de la lampe, que nous entretenions dans la cabane, le soir, devant la Madone, ne pouvant plus en acheter à la ville, semblait leur faire envie ; ils prétendaient que Fior d’Aliza, sa mère et Hyeronimo, nous n’avions, pas le droit d’aller cueillir les noisettes que nous pilions dans le mortier pour en tirer quelques gouttes. Ils disaient que ces noisettes des bois voisins et sans maître appartenaient bien aux écureuils, mais pas à nous ; ils ne voulaient pas non plus que nous ramassions la mousse des steppes des voisins pour en faire