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jocelyn.

Des mondes, que peut seul peser l’esprit de Dieu,
Elles sont les soleils, les centres, le milieu ;
L’océan de l’éther les absorbe en ses ondes
Comme des grains de sable, et chacun de ces mondes
Est lui-même un milieu pour des mondes pareils,
Ayant ainsi que nous leur lune et leurs soleils,
Et voyant comme nous des firmaments sans terme
S’élargir devant Dieu sans que rien le renferme !
Celles-là, décrivant des cercles sans compas,
Après avoir passé, ne repasseront pas.
Du firmament entier la page intarissable
Ne renfermerait pas le chiffre incalculable
Des siècles qui seront écoulés jusqu’au jour
Où leur orbite immense aura fermé son tour.
Elles suivent la courbe où Dieu les a lancées ;
L’homme, de son néant, les suit par ses pensées…
Et ceci, mes enfants, suffit pour vous prouver
Que l’homme est un esprit, puisqu’il peut s’élever,
De ce point de poussière et des ombres humaines,
Jusqu’à ces cieux sans fond et ces grands phénomènes.
Car voyez, mesurez, interrogez vos corps ;
Pour monter à ces feux faites tous vos efforts !
Vos pieds ne peuvent pas vous porter sur ces ondes ;
Votre main ne peut pas toucher, peser ces mondes ;
Dans les replis des cieux quand ils sont disparus,
Derrière leur rideau votre œil ne les voit plus ;
Nulle oreille n’entend sur la mer infinie
De leurs vagues d’éther l’orageuse harmonie ;
Le souffle de leur vol ne vient pas jusqu’à vous ;
Sous le dais de la nuit ils vous semblent des clous.
Et l’homme cependant arpente cette voûte ;
D’avance, à l’avenir nous écrivons leur route ;
Nous disons à celui qui n’est pas encore né
Quel jour au point du ciel tel astre ramené