Page:Lamartine - Œuvres complètes de Lamartine, tome 4.djvu/390

Cette page a été validée par deux contributeurs.
389
neuvième époque.

Et par des mains d’enfants au hameau balancée
Vient donner de si loin son coup à la pensée :
C’est l’Angelus qui tinte, et rappelle en tout lieu
Que le matin des jours et le soir sont à Dieu.
À ce pieux appel le laboureur s’arrête,
Il se tourne au clocher, il découvre sa tête,
Joint ses robustes mains d’où tombe l’aiguillon,
Élève un peu son âme au-dessus du sillon,
Tandis que les enfants, à genoux sur la terre,
Joignent leurs petits doigts dans les mains de leur mère.


Prière ! ô voix surnaturelle
Qui nous précipite à genoux ;
Instinct du ciel qui nous rappelle
Que la patrie est loin de nous ;
Vent qui souffle sur l’âme humaine,
Et de la paupière trop pleine
Fait déborder l’eau de ses pleurs,
Comme un vent qui, par intervalles,
Fait pleuvoir les eaux virginales
Du calice incliné des fleurs :


Sans toi que serait cette fange ?
Un monceau d’un impur limon,
Où l’homme après la brute mange
Les herbes qu’il tond du sillon.
Mais par toi son aile cassée
Soulève encore sa pensée
Pour respirer au vrai séjour,
La désaltérer dans sa course,