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huitième époque.

À chaque pas de plus, la fatale figure
M’entrait plus rayonnante au cœur ; mais à mesure
Que mon œil ébloui, qui plongeait dans le sien,
Fixait son œil ouvert et fixe sur le mien,
Comme si tout son sang eût coulé par sa vue,
Je la voyais pâlir et changer en statue ;
La prunelle immobile et le pied suspendu,
Le cou penché, le doigt vers ma place étendu,
Faire un pas, reculer, dans son sein qui se pâme
Chercher un cri qui meurt et qui manque à son âme,
Puis enfin, sans couleur, sans voix et sans regard,
Glisser inanimée aux bras du saint vieillard !
Moi-même, sans jeter un cri, sans faire un geste,
J’étais mort de sa mort : et j’ignore le reste.

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Quand je me réveillai comme de mon tombeau,
La nef était muette et vide ; un seul flambeau
Brillait comme une étoile au cintre de l’église ;
Le soir dans les vitraux faisait tinter la brise ;
L’heure sonnait huit coups au cadran de la nuit ;
De piliers en piliers je m’échappai sans bruit ;
À force de douleur mon âme était tarie.
La revoir, c’était trop ! mais la revoir flétrie,
Mais la revoir tombée, ange d’illusion,
Le scandale du monde et sa dérision !
Par moi, par mon amour, par ma vertu peut-être !
Oh ! quel doute mortel en moi je sens renaître !