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septième époque.


Aussi qu’étais-je ici que ta vivante image ?
Ton œil semblait avoir façonné mon visage ;
Jeune, dans la maison on ne distinguait pas
Le timbre de nos voix ni le bruit de nos pas ;
Par le frémissement de chaque même idée
Dans le même moment notre âme était ridée ;
Le même sentiment battait dans nos deux cœurs ;
Si tu devais pleurer, mes yeux roulaient des pleurs ;
S’il passait sur mon front quelque fraîche pensée,
D’un sourire avant moi ta lèvre était plissée.
Un en deux, toi le tronc, moi le tendre rameau ;
Toi la voix, moi le son ; toi la source, et moi l’eau !
Union si profonde et si forte des âmes,
Que Dieu seul peut de l’œil en démêler les trames ;
Que lui seul peut savoir, en sondant nos deux cœurs,
Si c’est toi qui survis, ou si c’est moi qui meurs.

. . . . . . . . . . . . . . .

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Meurs ? oh ! non, car je crois ! Meurs ? oh ! non, car tu vis !
Ma mère, dans la mort je suis encor ton fils !
Dans l’éternel bonheur où la vertu t’appelle,
Un ciel remplirait-il une âme maternelle ?
Non ! Si Dieu lui donnait le ciel sans son enfant,
Son cœur demanderait son fils ou le néant.
Oh ! je crois au néant plutôt qu’à ton absence !
Sur la foi de mon cœur je marche en ta présence,
Je sens ce cœur brûlant sous ta main s’apaiser ;
Mon front baissé frémit comme sous ton baiser.