» Où l’âme des chrétiens, prête à quitter le corps,
» De l’abîme des temps voit déjà les deux bords,
» Où de l’éternité l’atmosphère divine
» D’un jour surnaturel dans sa nuit l’illumine,
» Et, des choses d’en bas lui découvrant le sens,
» Donne un son prophétique à ses derniers accents.
» Sans crainte alors on parle, et l’on entend sans doute ;
» Dans la voix du mourant c’est Dieu que l’on écoute.
» Je suis à cet instant, et je sens dans mon cœur
» Ce Verbe du Très-Haut qui parle sans erreur.
» Il me dit d’arracher, d’une main surhumaine,
» Un de ses fils au piége où le monde l’entraîne ;
» Il donne à mes accents l’autorité du sort ;
» Je prends sur moi l’arrêt qui de mes lèvres sort,
» Je prends sur mon salut la sainte violence
» Qui vous jette à mes pieds sans plus de résistance :
» Obéissez à Dieu, qui tonne dans ma voix ! »
De sa main, de ses fers mon front sentit le poids ;
Je crus sentir de Dieu la main et le tonnerre
Qui m’écrasaient du bruit et du coup sur la terre.
Pétrifié d’horreur, tous les sens foudroyés,
Je tombai sans parole et sans souffle à ses piés :
Un changement divin se fit dans tout mon être ;
Quand il me releva de terre, j’étais prêtre !…
Le vieillard à son tour à mes pieds se jeta,
Et confessa sa vie au Dieu qui l’écouta ;
Puis me fit célébrer pour lui le saint mystère.
Un angle du rocher fut notre autre Calvaire.