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jocelyn.

De la grotte, 29 octobre 1793.

Beauté, secret d’en haut, rayon, divin emblème,
Qui sait d’où tu descends ? qui sait pourquoi l’on t’aime,
Pourquoi l’œil te poursuit, pourquoi le cœur aimant
Se précipite à toi comme un fer à l’aimant,
D’une invincible étreinte à ton ombre s’attache,
S’embrase à ton approche et meurt quand on l’arrache ?
Soit que, comme un premier ou cinquième élément,
Répandue ici-bas et dans le firmament,
Sous des aspects divers ta force se dévoile,
Attire nos regards aux rayons de l’étoile,
Aux mouvements des mers, à la courbe des cieux,
Aux flexibles ruisseaux, aux arbres gracieux ;
Soit qu’en traits plus parlants sous nos yeux imprimée,
Et frappant de ton sceau la nature animée,
Tu donnes au lion l’effroi de ses regards,
Au cheval l’ondoiement de ses longs crins épars,
À l’aigle l’envergure et l’ombre de ses ailes,
Ou leurs enlacements au cou des tourterelles ;
Soit enfin qu’éclatant sur le visage humain,
Miroir de ta puissance, abrégé de ta main,
Dans les traits, les couleurs dont ta main le décore,
Au front d’homme ou de femme, où l’on te voit éclore,
Tu jettes ce rayon de grâce et de fierté
Que l’œil ne peut fixer sans en être humecté ;
Nul ne sait ton secret, tout subit ton empire ;
Toute âme à ton aspect ou s’écrie ou soupire ;