pour la chasse et son aimable cordialité avaient rendu familier et cher à tous les foyers de la haute Bourgogne. Il aimait les vers et la littérature autant que la voix des chiens dans les forêts et le galop des chevaux sous les voûtes de feuilles ; cette analogie de goûts nous avait naturellement liés. Il fut depuis un de mes compagnons de tente dans les déserts de la Mésopotamie et dans les rochers de la Palestine. Hélas ! il n’habite plus ici-bas que dans ma mémoire ; mais il est un de ces absents dont on fait toujours commémoration, et dont le souvenir sourit jusque dans la mort !
« Savez-vous où nous sommes ? me dit-il avec l’accent d’interrogation fine et suspendue d’un homme qui aime à causer une surprise agréable.
» — Non, lui dis-je, mais c’est un des plus moroses paysages et une des plus mélancoliques ruines que j’aie jamais rencontrées dans nos chasses.
» — Je le crois bien, reprit-il, mais cette vallée et ce château vous donneraient bien plus d’émotion aux yeux et au cœur, si vous en saviez le nom, et si je vous disais de qui ces ruines furent le berceau ?
» — Où sommes-nous donc ? lui dis-je.
» — A Bourbilly, me répondit-il, château de madame de Sévigné ! »
A ce nom, le paysage, indifférent et mort tout à, l’heure, s’illumina soudain pour moi comme si on avait allumé un phare sur toutes les tourelles du château et sur toutes le collines du morne horizon ; je crus voir les ondes paresseuses et les flaques d’eau extravasée du Serin dans les prairies réfléchir l’image de cette enfant aux cheveux blonds, devenue l’enfant chéri de son siècle ; je crus entendre son nom murmuré par la rivière, par les feuilles, par les échos des vieux murs, et jusque par les cris des corneilles effarées autour des créneaux du donjon ! Puis-