Page:Lamartine - Œuvres complètes de Lamartine, tome 36.djvu/44

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
43
MADAME DE SÉVIGNÉ.

tion de la sagesse infinie et de la bonté suprême qui a chargé la nature elle-même de nous promulguer le premier article de cette constitution du genre humain.

La Providence, par une loi aussi mystérieuse qu’elle est clémente, a voulu que l’espèce humaine ne se créãt et ne se conservât que par l’amour. Elle a placé une passion sympathique aux sources de la vie pour enfanter l’homme, et une affection sympathique aux sources de la famille pour perpétuer la société. Par un mystère de notre origine qui est en même temps une révélation de notre destinée, l’être isolé peut vivre, mais il ne peut se perpétuer ; il suffit d’être un pour exister, il faut être deux pour créer. L’unité est inféconde, le couple est éternel.

De ce couple, naît par l’amour un troisième être qui le complète, c’est le fruit de l’amour ou l’enfant. Jusqu’à la naissance de l’enfant, il y avait union, il n’y avait pas encore famille ; l’esprit de famille, c’est-à-dire d’amour conservateur, multiplié par l’être nouveau qui l’inspire et qui le ressent, naît avec le premier enfant dans l’âme du père et de la mère, et remonte par une réciprocité instinctive aussi de l’enfant à la mère et au père. L’enfant les aime parce qu’il en est aimé. Voilà le groupe achevé ! Voilà la trinité de la nature, d’où jaillit et rejaillit l’amour comme l’esprit saint de l’humanité, l’esprit de famille !

Quand la famille se développe et se multiplie dans d’autres enfants ou petits-enfants, avec elle se multiplie et se diversifie sous mille formes nouvelles, et dans mille proportions inégales et graduées, cet amour allumé à son premier foyer, le sein de la mère ; foyer dont chacun emporte et rapporte une parcelle au groupe commun dont il fait partie. Les rapports entre ces différents membres du groupe humain s’étendent, se diversifient, se combinent à l’infini de l’un a l’autre, d’un seul a tous, de tous à un ; c’est ce qu’on appelle la parenté ; parenté du sang, parenté