Entre la mer et vous, écrasés ou noyés,
Ils auront disparu comme une onde tarie,
Et leurs os fumeront le sol de la patrie !
Allez, ne craignez rien, mon ombre est sur vos pas.
Je connais vos pensées, ne me les dites pas !
Vous craignez les Français, votre cœur s’épouvante
De cet art meurtrier dont leur orgueil se vante.
Que peut-il contre un peuple ? Enfants, vous allez voir.
Apportez-moi ces grains de maïs blanc et noir.
Vous ne voyez que blanc quand votre front s’y penche ?
À vos yeux effrayés toute la coupe est blanche…
Or, pourquoi les grains blancs sont-ils seuls aperçus ?…
Peuple pauvre d’esprit ! en ! c’est qu’ils sont dessus !…
Mais attendez un peu.
En remuant les grains, voyez comme tout change !
On ne voyait que blanc, on ne voit plus que noir ;
Le nombre couvre tout, et ceci vous fait voir
Comment l’égalité, quand l’honneur la rappelle,
Rend à chaque couleur sa valeur naturelle !
Tout leur art n’y peut rien. — Ils sont un et vous dix. —
Haïti sera noir, c’est moi qui vous le dis.
Allez ! et laissez-moi penser pour la patrie.