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ACTE I, SCÈNE IV

ACTE DEUXIÈME


L’intérieur de la tour élevée qui sert de cabinet et d’observatoire à Toussaint Louverture. Au milieu, une table encombrée de cartes et de papiers et éclairée par une lampe de fer. À droite, un prie-Dieu surmonté d’un crucifix. À gauche, auprès d’une porte secrète, un meuble garni de vases et de corbeilles. Au fond, à droite, une grande porte cintrée. À gauche, une fenêtre tendue d’un store.

SCÈNE   PREMIÈRE

TOUSSAINT, seul. Il se promène à pas interrompus et inégaux.

Enfin la voilà donc, cette heure redoutable
Que mes prévisions jugeaient inévitable !
En vain j’ai supplié Dieu de nous l’épargner ;
Pour décider de nous elle devait sonner !
Entre la race blanche et la famille noire,
Il fallait le combat puisqu’il faut la victoire !…

Il s’arrête un moment.

À quelle épreuve, ô ciel ! cette nuit me soumet !
J’ai monté, j’ai monté… voilà donc le sommet
Où mon ambition, de doutes assiégée,
Par ma race et par Dieu va demeurer jugée :
Moïse ainsi monta chercher au Sinaï
Quelle route suivraient les fils d’Adonaï.
Du haut de sa terreur et de sa solitude,
Il vit là le Jourdain et là la servitude.